Entre forêts parfumées, panorama ouvert sur les vallées andorranes et miroir d’eau serti dans un écrin de pins, le lac d’Engolasters a tout d’une carte postale… avec, en prime, un parfum de légende. Accessible à tous, cette randonnée douce mêle nature préservée, histoire hydroélectrique et mythes ancestraux. Ici, chaque pas rapproche un peu plus d’un lieu où l’eau semble avaler les étoiles et où le temps paraît suspendu…
La randonnée débute au Parking de Les Pardines (souvent appelé en français Parking des Pardines), situé à la sortie d’Encamp. Le sentier que nous empruntons était autrefois utilisé pour l’entretien des canaux et relie Sant Miquel de Prats (paroisse de Canillo) à Sant Miquel d’Engolasters. Il fait également partie du circuit des Fonts. Pour cette après-midi, nous nous contenterons de la portion allant de Les Pardines au lac d’Engolasters.
Dès les premiers pas, le tracé suit le canal : à main droite, la vallée s’ouvre sur un vaste panorama, avec Encamp et Andorre-la-Vieille blotties au fond. Sur la gauche, la pente boisée est tapissée de pins sylvestres et de pins noirs, dont le parfum se mêle à celui des genévriers et du sous-bois. Ici et là, de petites sources jaillissent.
L’itinéraire se poursuit sur le sentier botanique des Pardines, jalonné de panneaux dédiés à la flore locale. Au fil de la marche, l’histoire affleure : cette zone joua un rôle majeur dans le développement économique de l’Andorre au XXᵉ siècle. Un vaste réseau de canaux y fut aménagé pour capter les eaux de la rivière Madriu et alimenter en énergie hydroélectrique la vallée. Plus bas, la centrale d’Escaldes est encore approvisionnée par le lac.
Après environ 4 km d’ascension, à 1 622 m d’altitude, le lac se dévoile enfin, lové sur le versant nord-ouest de la Tossa de Braibal. Sa surface sombre reflète à peine le ciel, d’où son nom énigmatique : Engolasters, « l’avaleur d’étoiles ». La tradition rapporte qu’un village entier y fut englouti pour avoir refusé un morceau de pain à un pèlerin, ou encore que des sorcières s’y baignaient nues les nuits de pleine lune, condamnant en chat noir quiconque osait les surprendre…

Le tour du lac est un sentier plat d’environ 3 km, réalisable en 45 minutes, qui permet d’admirer sous différents angles ce plan d’eau glaciaire transformé en retenue artificielle en 1934. Des aires de pique-nique sont installées à l’ombre, et plusieurs restaurants, permettent de prolonger la pause avec une spécialité locale. Les amateurs de pêche peuvent tenter leur chance à la truite.
Pour le retour, nous empruntons un sentier qui s’élève doucement en forêt. Au détour du chemin, une étrange structure en bois attire notre regard. Avec ses rondelles empilées, elle évoque d’abord un igloo perdu au cœur des sapins. Plus loin, une autre installation identique dévoile la clé du mystère : il s’agit en réalité de la reconstitution d’une ancienne charbonnière. Témoignage d’un métier rude aujourd’hui disparu, elle nourrit autant la mémoire que l’imaginaire, invitant le promeneur à rêver d’abris éphémères, entre conte et réalité.
Autrefois, les forêts andorranes résonnaient du travail des charbonniers. Pour fabriquer une charbonnière, on choisissait un endroit accessible et plat, parfois renforcé par de petits murs de soutènement. Un pieu central servait de repère pour bâtir une cheminée sommaire, puis les troncs étaient disposés tout autour, rangés verticalement en plusieurs étages. Le tout était ensuite recouvert de feuilles, de mousse et enfin de terre, afin d’assurer une combustion lente et régulière.
L’allumage se faisait par le haut, en introduisant des braises dans la cheminée. La carbonisation pouvait durer plusieurs jours, parfois jusqu’à cinq pour une meule de quatre mètres de diamètre. Quand le bois s’était transformé en charbon, on séparait les produits et on les mesurait en “charges” (carregues). Ces charges étaient ensuite livrées aux forges par des porteurs, souvent à dos de mulet ou d’âne.
Pendant près de trois siècles, les forêts d’Andorre furent intensément exploitées pour alimenter les forges, véritable moteur économique du pays. Aujourd’hui encore, le paysage conserve les traces de cette activité : ruines, terrasses, dépressions, restes de charbonnières et de forges rappellent l’importance de ce savoir-faire disparu, qui fait désormais partie du patrimoine culturel andorran.
Sur le chemin du retour, en direction du parking de Les Pardines, le regard s’égare une dernière fois vers les sommets et vallées andorranes, enveloppés de lumière.
Informations pratiques
Situation: Andorre
Accès: Depuis Encamp ou Escaldes-Engordany, par la route de Les Pardines
Date: Le 17 octobre 2022
Altitude minimale: 1626 m
Altitude maximale: 1713 m
Dénivelé cumulé: Environ 100 m
Itinéraire: Aller – Retour de 9 km
Horaire: 2 H 30
Carte: Alpina E-40 Andorra – Comapedrosa
Trace GPS: Télécharger
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